Synopsis - Communiqué de Presse

NÉANDERTAL - LE RETOUR

Néandertal - Le Retour

Un film de Sophie Cattoire

Des chercheurs à la pointe nous parlent d'un homme à la masse découvert par des curés à la pioche

2018 – Célébration des cent-cinquante ans de la naissance de la Préhistoire

Les gorilles n'enterrent pas leurs morts...

Ce qui s'est passé en 1908 dans le petit village de La Chapelle-aux-Saints en Corrèze provoqua un cataclysme dont on a déjà un peu oublié la portée. Imaginez plutôt : deux curés érudits et passionnés d'archéologie, les frères Jean et Amédée Bouyssonnie accompagnés par leur frère Paul, découvrent sous leurs coups de pioches dans une petite cavité à flanc de rocher, le squelette formidablement bien conservé d'un homme fossile, c'est-à-dire disparu : un vieillard néandertalien en position sépulcrale !

Les ossements robustes caractéristiques de ces chasseurs-cueilleurs, forces de la nature qui ont survécu 350 000 ans sur un vaste territoire allant de l'Europe à l'Asie en passant par le Proche-Orient, gisaient paisiblement et en parfaite connexion anatomique. En clair, les hyènes des cavernes et autres prédateurs des « âges farouches » n'avaient pas eu le loisir de le dévorer parce que ses congénères avaient pris soin d'ensevelir son corps délicatement.

Tout d'un coup, Néandertal se trouvait comme sauvé par ses morts ! Il quittait son statut de bête velue et plutôt égarée et déboulait, grâce à cette pratique funéraire, dans la noble famille des humains patentés.

Il faut se souvenir que le premier crâne de ce type, si différent du nôtre avec ses fameux bourrelets sus-orbitaires formant cette étrange visière, son nez épaté et son menton fuyant, découvert dans la vallée de Néander en Allemagne en 1856, avait été aussitôt remisé dans le tiroir des cas pathologiques, au titre de raté. Le problème c'est qu'on en avait trouvé d'autres dans la foulée, avec les mêmes particularités. Le groupe commençait à se constituer de manière irréfutable, comme une tribu de revenants têtus et bien déterminés à ce qu'on leur fasse une place dans nos musées.

Néandertal : un gorille amélioré à mi-chemin entre le singe et l'homme...

C'est le Musée de l'Homme à Paris qui reçut les caisses contenant les restes du bonhomme de La Chapelle-aux-Saints. Et c'est l'anthropologue Marcelin Boule qui eut pour mission de l'étudier. Convaincu du fait que cette créature ne pouvait pas faire partie de notre famille, il finit par lui attribuer une place intermédiaire entre les grands singes et l'homme, répondant au fameux fantasme du chaînon manquant qui peuplait alors les imaginaires, résultant d'une vision linéaire de l'évolution des espèces tout à fait illusoire. Aujourd'hui les chercheurs ont démontré que l'évolution est buissonnante, comme une sorte de labyrinthe doté d'énormément de ramifications qui ne filent jamais droit et donnent bien du fil à retordre aux préhistoriens...

Jean-Louis Heim l'a remis debout et lui a rendu la parole

Bien plus tard, dans les années 80, c'est le paléoanthropologue du Musée de l'Homme Jean-Louis Heim qui remettra un peu d'ordre dans tout ça. Il retire les morceaux de bouchon de liège et la colle à poisson qui maintenait l'homme fossile en posture courbée, comme arc-bouté vers l'avant. Il replace les os dans leurs connexions d'origine. Dès lors, l'Homme de La Chapelle-aux-Saints se redresse et retrouve le potentiel anatomique phonatoire nécessaire pour parler. La première monographie devient caduque, le long chemin vers la réhabilitation progresse à grands pas. Depuis, de nombreux chercheurs sont à pied d’œuvre pour démontrer toutes les capacités qu'avaient ces hommes-là, différents et non inférieurs.

Le retour du bonhomme accueilli à bras ouverts tel « un vieux de notre terre ».

Un siècle après 1908, l'Homme de la Chapelle-aux-Saints eut pour la première fois l'autorisation de quitter le Musée de l'Homme à Paris, avec vue sur la tour Eiffel, pour rentrer au pays dans son petit village de Corrèze, pour quelques jours. Le temps de célébrer le centenaire de sa découverte. Transportés en camion blindé, les caissons contenant son crâne et son squelette furent déposés à l'intérieur de l'Église du village. Une fameuse revanche pour celui qui n'étant pas à l'image de Dieu, c'est-à-dire à la nôtre, s'était retrouvé si longtemps ostracisé, repoussé du côté des grands singes. Et à cet instant, une scène furtive et pourtant essentielle se joua. Quatre villageois, ceux-là mêmes qui dans leur communauté endossent habituellement le rôle de porteurs de cercueils, se positionnèrent aux quatre coins de sa vitrine pour la faire entrer dans la nef avec douceur et recueillement, comme un vieux du pays enfin de retour, « un vieux de notre terre » comme ils nous l'expliquèrent fièrement peu après.

Des scientifiques à la pointe nous parlent d'un homme « à la masse » découvert par des curés à la pioche

Ce centenaire présidé par le Professeur Yves Coppens rassembla de nombreux chercheurs qui prirent le temps de nous raconter tout le chemin parcouru par l'Homme de Néandertal pour parvenir à être reconnu comme un homme à part entière. Chacun dans son domaine relate ainsi tout le travail accompli par la science pour lui faire une place dans notre lignée. Revoir ce document 10 ans plus tard, en 2018, c'est mesurer la vitesse exponentielle avec laquelle la paléogénétique a depuis progressé. Ce sentiment d'appartenance à la même famille exprimé par les villageois rassemblés autour du fossile original en 2008 a depuis été prodigieusement démontré par le décryptage du génome de Néandertal. En 2010, l'équipe du biologiste suédois Svante Pääbo, en charge du département de génétique évolutionniste du Max Planck Institut de Leipzig, publie ses conclusions en ces termes :

L'homme de Néandertal est notre parent le plus proche. Nous partageons en Eurasie de 1 à 4 % de nos gènes avec lui.

Dès lors, à l'issue de la projection de ce film documentaire et au regard des avancées de la paléogénétique, le débat tout à fait fondamental qui secoue aujourd'hui les milieux scientifiques peut être abordé avec le grand public :

Que recouvre le terme d'espèce, quelle en est à ce jour la définition ?

De fait, ce concept est en pleine évolution. Autrefois, nous appartenions à la même espèce si nous pouvions nous reproduire et si les enfants issus de ces unions étaient eux-mêmes interféconds. Puisqu'il a été démontré qu'il y avait un peu de Néandertal en nous, c'est qu'il y eut concrètement des croisements entre Néandertal et Cro-Magnon, il y a entre 90 000 ans et 40 000 ans. Selon cette définition, Néandertal et Cro-Magnon appartiennent donc à la même espèce, celle des Homo sapiens... Alors faut-il changer de définition ?

Voilà tout l'intérêt de ce documentaire intitulé Néandertal, le Retour : pouvoir poser clairement cette fascinante question et inviter les chercheurs à y répondre... dans l'état actuel de nos connaissances.

Sophie Cattoire

journaliste grand reporter et réalisatrice

Photos pour la presse

FERRASSIE TV